Films vus en compagnie
Wendell & Wild d’Henry Selick (2022)

Ce film d’animation en stop-motion réalisé par Henry Selick et coscénarisé par Jordan Peele avait tout pour me plaire. Je n’ai pourtant pas accroché, notamment à cause des deux démons doublés par Key & Peele. Les sketches de Key & Peele sont souvent satiriques, ils se moquent de certains aspects de la société américaine et de son racisme. Pas dans Wendell & Wild, où l'humour, fortement influencé par Abbott & Costello, est composé de dialogues burlesques jouant sur le rythme et l’absurde. C’est assez représentatif du film, dont les aspects sociaux ne constituent qu’un léger vernis : des thèmes comme les programmes de réinsertion, la désertification des petites villes, la privatisation des prisons ou les excès du capitalisme sont abordés au début puis laissés de côté. Les discussions entre Wendell & Wild occupent beaucoup trop de place, le scénario se révèle très classique et beaucoup moins sombre que ce que j’espérais au départ.
The Batman de Matt Reeves (2022)

Bruce est triste parce qu’il a perdu son papa. Son papa était gentil, Bruce l’aimait beaucoup. Alfred, le papa de substitution, est gentil aussi mais c’est pas son vrai papa. Du coup Bruce il est tout perturbé dans sa tête et il se déguise pour taper des vilains. Un jour, un pas gentil avec un masque encore plus moche que celui de Bruce dit que le papa de Bruce c’était aussi un pas beau. Oh là là, Bruce il a un gros chagrin. Mais non, en fait c’était une blague, le papa de Bruce il n’était pas si méchant que ça. Ouf, on a eu peur dis donc, c’était super comme film… La prochaine fois j’irai lire une histoire de Babar, ce sera plus trépidant et ça me prendra moins de temps.
De uskyldige d’Eskil Vogt (2021, The Innocents)

Mélange de film d’horreur et de super-héros à la sauce norvégienne, The Innocents est une bonne surprise. L’utilisation d’enfants et l’ambiance angoissante permettent de renouveler les poncifs et de donner de l’originalité à la classique histoire des jeunes héros découvrant leurs pouvoirs et leurs grandes responsabilités. Mention spéciale à la manipulation des gens par Ben, qui transforme leur perception de la réalité en les plongeant dans un monde de cauchemar.
The Meyerowitz Stories (New and Selected) de Noah Baumbach (2017)

Noah Baumbach est un réalisateur new-yorkais à la mode depuis le milieu des années 2000, qui aime les histoires de familles bourgeoises new-yorkaises. Outre The Meyerowitz Stories, j’ai juste vu de lui Les Berkman se séparent, pas trop mal dans mon souvenir.
The Meyerowitz Stories fonctionne bien dans l’ensemble, essentiellement grâce aux acteurs et actrices, tous très bons dans leur rôle. Dustin Hoffman, que je n’avais pas vu depuis longtemps, joue parfaitement le patriarche égocentrique, et le trio de frères et sœur Adam Sandler, Elizabeth Marvel et Ben Stiller possède une bonne alchimie.
Village of the Damned de John Carpenter (1995, Le village des damnés)

J’avais vu cette version quand j’étais ado, avant l’original de 1960 (les deux films sont tirés d’un roman de John Wyndham que je n’ai jamais lu). J’avais bien aimé à l’époque et j’étais curieux de le revoir, la réputation du Carpenter étant assez mauvaise. Je comprends pourquoi à présent.
Le film de Carpenter est beaucoup trop démonstratif, assez grossier dans ses effets et dans ses situations. Il reprend de nombreuses scènes de l’original, film anglais très sobre, mais y ajoute du pathos inutile et de la mauvaise musique (Carpenter n’a composé qu’une petite partie de la BO et ça se sent). Il ajoute un personnage de gentil petit garçon émotif dans le groupe des enfants de l’enfer, qu’il sauve à la fin. Il tue par contre beaucoup plus de protagonistes que nécessaire, notamment lors d’une scène de guerre totalement ridicule vers la fin. La couleur dessert également le film, les yeux qui brillent et le look des enfants rendaient mieux en noir et blanc. Seul point positif : l’épidémiologiste du FBI jouée par Kirstie Alley, sorte de Scully impitoyable, pas assez exploitée.
Films vus seuls
乞食大将 [Kojiki taishô] de Sadatsugu Matsuda (1952, Beggar General)

Filmé durant la deuxième moitié de 1945 et interdit par les forces d’occupation après la guerre, Kojiki taishô est un film assez léger centré sur un samouraï jovial et bon vivant. Les notions d’honneur et d’honnêteté sont, comme toujours, mises en avant, mais cela reste raisonnable, on sent que la guerre se termine et que la censure s’allège. Il sortit finalement sur les écrans en 1952. Correct sans plus.
女の座 [Onna no za] de Mikio Naruse (1962, La place de la femme)

On retrouve ici le même genre de scénario que dans Fille, épouse et mère, avec une famille nombreuse aux enfants plus ou moins ingrats. Mais là où Fille, épouse et mère évitait le pathos, La place de la femme y plonge allègrement dans le dernier tiers du film, avec l’arrivée d’un fils issu d’un premier mariage de la mère et la jalousie d’une des filles envers la belle-fille (jouée par Hideko Takamine). C’est dommage parce que la première partie du film était plaisante.
赤いハンカチ [Akai hankachi] de Toshio Masuda (1964, Le mouchoir rouge)

On est dans du Nikkatsu noir des plus classiques avec son héros taciturne qui se fait rouler et finit poursuivi par la police et par les gangsters, dans un Yokohama sombre et pluvieux. Yûjirô Ishihara joue son rôle habituel de gars ténébreux accompagné d’une guitare et chantant des petites chansons dès qu’il a cinq minutes à tuer. Le film m’a rappelé Red Pier (1958) ou Rusty Knife (1958) du même réalisateur. Les acteurs sont bons et l’actrice principale, Ruriko Asaoka, réussit à surnager malgré son personnage convenu (comme toujours dans ce genre de films). Ca faisait longtemps que je n’avais pas vu un Nikkatsu noir et ça m’a fait plaisir.
毎日が夏休み [Mainichi ga natsuyasumi] de Shûsuke Kaneko (1994, It's a Summer Vacation Everyday)

C’est assez amusant que ce film fauché et fantasque soit réalisé par Shûsuke Kaneko, connu pour sa trilogie Gamera dans la deuxième moitié des années 90 et pour Death Note dans les années 2000. Mainichi ga natsuyasumi est une petite comédie centrée sur le personnage de la fille. Elle raconte en voix-off ses aventures, entrainée par son distant et impassible beau-père, un homme qui, sous couvert de réussite, est en fait déçu par sa vie et son métier. C’est très naïf et complètement surjoué, la mère notamment est en roue libre du début à la fin. Ça reste gentil et distrayant dans l’ensemble.
ചുരുളി [Churuli] de Lijo Jose Pellissery (2021)

Le pitch imdb du film parle clairement de boucle temporelle et j’ai regardé Churuli principalement pour cette raison. Je ne sais pas ce qu’à fumé la personne qui a fait ce pitch mais on n’a pas dû voir le même machin. Je ne dis pas qu’il n’y a pas de boucle temporelle, peut-être que oui, peut-être que non, car rien n’est clair dans ce film. Un des flics dit qu’il a l’impression d’être là depuis longtemps alors qu’ils viennent d’arriver, on parle de deux policiers qui seraient venus précédemment dans le village et auraient disparu, certains habitants disent à un des flics qu’ils ont l’impression de l’avoir déjà vu… En parallèle, il y a une progression narrative, de nouveaux personnages arrivent au fur et à mesure et des évènements nouveaux surviennent. Difficile de parler de boucle temporelle au sens classique du terme. Il faut plutôt regarder d’après moi du côté de la réincarnation ou d’une sorte de cycle, tout le film étant la répétition d’événements déjà survenus à des incarnations précédentes des personnages.
Bien que ce soit une expérience, je ne recommanderais pas vraiment Churuli : c’est volontairement lent, répétitif, fondé sur l’attente d’une découverte qui n’arrive pas, avec un côté mystique un peu chelou. C’est aussi très vulgaire de ce que j’ai pu lire mais ça ne ressort pas clairement dans les sous-titres anglais. Un film étrange, pas vraiment ce que j’en attendais.
Maria do Mar de José Leitão de Barros (1930)

Deuxième docufiction de José Leitão de Barros, Maria do Mar est plus orientée fiction que documentaire, à l’inverse de Lisboa, Crónica Anedótica. Il y a cette fois une histoire, un drame assez classique avec des jeunes amoureux de familles rivales. La rivalité peut sembler excessive mais, quand je me souviens des querelles de voisinage dans le village de ma grand-mère dans le Nord du Portugal, je me dis que ça reste vraisemblable. Le film est tourné à Nazaré, il s’attarde sans excès sur les habitudes des pêcheurs et les fêtes locales. Cela reste un drame très classique et platement filmé, malgré un montage parfois rapide. Je n’ai pas réussi à récupérer une copie correcte et celle que j’ai vu était assez affreuse, je ne sais pas si le film a été restauré.
Barbanegra de George Pallu (1920)

Encore un film du français George Pallu tourné pour Invicta Film, la compagnie de production de Porto. Il se déroule cette fois à Cascais, ville côtière située à une quarantaine de kilomètres de Lisbonne. Le film ressemble à certains serials de la même époque, en beaucoup plus ramassé vu qu’il dure un peu moins d’une heure. On assiste tout de même à un enchaînement de situations rocambolesques sur un ton plutôt léger. Ça part dans tous les sens, ça ne se tient souvent pas très bien et il y a bien mieux dans le genre à cette époque, mais j’ai trouvé ça assez sympathique malgré tout.
Séries
灰羽連盟 [Haibane renmei] de Tomokazu Tokoro (2002, Ailes grises), 13 épisodes

Je n’avais pas entendu parler de cette série avant de lire Anime From Akira To Howl's Moving Castle. La description de la série par Susan Napier m’a intrigué et j’ai eu envie de la voir.
L’univers est intéressant et ouvre pas mal de pistes non explorées. La série est apparemment inspirée du roman La Fin des temps de Haruki Murakami, qu’il faudra que je lise un jour. En l’état, je pense que la ville est une sorte de purgatoire et que les Haibane sont des suicidées en attente d’expiation. Le rythme est assez lent, il ne se passe pas grand-chose en 13 épisodes et l’héroïne est assez agaçante, passant son temps à larmoyer et à se morfondre. Quelques bonnes idées donc pas franchement exploitées.
Livres
La pierre des étoiles de Roger Zelazny (Denoël, collection « Présence du futur », 1998), 192 p.

J’ai récupéré ces dernières semaines plus de 200 bouquins de SF et de fantasy qui trainaient chez ma mère, achetés 10 francs pièce dans des bouquineries quand j’étais ado/jeune adulte. J’en ai probablement lu plus des deux tiers mais je n’ai plus la moindre idée desquels. Je suis sûr d’avoir lu certains cycles comme les Hawkmoon, Elric ou Corum de Moorcock, La Belgariade et La Mallorée d’Eddings ou le Cycle des épées de Leiber mais, pour les romans hors cycle, tout est flou. En lisant La pierre des étoiles, je me suis ainsi demandé si j’entrevoyais la suite du scénario parce qu’il était prévisible ou parce que je l’avais déjà lu il y a plus de 20 ans…
Comme souvent chez Zelazny, le héros est un personnage exceptionnel et sûr de lui, qui finit par surmonter toutes les difficultés mises sur son chemin. Le ton est léger et l’univers assez farfelu, avec des extraterrestres déguisés en wombat ou en kangourou. Le personnage principal, éternel étudiant touche-à-tout m’a fait un peu penser à Flynn Carson dans la trilogie de films The Librarian, sorte d’Indiana Jones du pauvre. Rien de mémorable mais ça se lit agréablement.
Les fleurs rouges (Oeuvres 1967-1968) de Yoshiharu Tsuge (Cornélius, 2019), 264 p.

Ce volume est plus homogène que le précédent, avec des récits plutôt réalistes ponctuées de touches autobiographiques. Les aspects bizarres ou fantastiques sont très légers, moins prononcés paradoxalement que dans les trois nouvelles que j’avais bien aimées dans le volume précédent. Je ne suis pas encore conquis, j’attends de lire le prochain volume qui contient une de ses nouvelles les plus célèbres, La vis.
La nuit de la lumière de Philip José Farmer (J’ai lu, collection « S-F », 1996), 189 p.

C’est peut-être le premier bouquin que je lis de Philip José Farmer. J’ai 3 ou 4 romans de lui mais il me semble que je ne les ai jamais lus. La nuit de la lumière est découpée en deux parties à peu près égales : une première partie où John Carmody cherche à tuer un Dieu, et une seconde partie située quelques décennies plus tard où on voit les conséquences de ses actes.
Le personnage de John Carmody est vraiment ignoble dans la première partie et j’ai eu du mal à éprouver de l’empathie pour lui dans la deuxième partie. L’histoire baigne dans un climat mystico-religieux dont je ne suis pas fan et la fin m’a laissé assez dubitatif. Le climat horrifique durant la Nuit de la lumière assez bien retranscrit mais ça ne m’a pas suffi.
Appâter le chaland avec de la boucle temporelle alors qu'il n'en est rien est un crime impardonnable.
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