samedi 14 décembre 2024

Carnet de bord 07/12/2024-13/12/2024



Films vus en compagnie
Riddle of Fire de Weston Razooli (2023)
Deux frères, Jodie et Hazel, accompagnés de leur amie Alice dérobent une console de jeux vidéo dans un entrepôt. De retour à la maison, ils constatent que leur mère grippée a verrouillé la télévision. Elle consent à les laisser l’utiliser s’ils vont lui chercher une tarte à la myrtille dans un café en ville. Malheureusement, en l’absence de la pâtissière, l’établissement n’a plus le gâteau désiré. Jodie, Hazel et Alice décident de cuisiner leur propre tarte, récupèrent la recette et se rendent au supermarché pour voler les ingrédients. Au moment où ils s’apprêtent à attraper la dernière boite d’œufs, un individu leur pique sous leur nez. Alice le prend pour une insulte personnelle, les enfants le suivent jusque chez lui pour lui subtiliser ses œufs.

Riddle of Fire est le premier long métrage de Weston Razooli, tourné en pellicule Kodak 16mm en hommage aux films d’aventures Disney des années 70. Dans une interview à Sci-fi Now, il dit s’être inspiré des Quatre cents coups (1959), de La forteresse cachée (1958) et de Où est la maison de mon ami ? (1987). Je n’ai pu m’empêcher de penser également aux Goonies (1985) et autres productions Amblin des années 80. Le côté bricolé est assumé, avec des gosses au jeu approximatif (surtout Jodie), des méchants d’opérettes et un enchaînement improbable de péripéties. Il y a clairement un ventre mou central, chaque idée est étirée au maximum et Riddle of Fire a divisé la critique à Cannes. Même si un montage resserré aurait été bénéfique, j’ai pour ma part apprécié cette ambiance de folie douce et gentille qui dégage une belle joie de vivre.


Furiosa: A Mad Max Saga de George Miller (2024, Furiosa : Une saga Mad Max)
Dans une forêt secrète, exceptionnel lieu de verdure dans un monde postapocalyptique désertique, une fillette nommée Furiosa est kidnappée par des motards. Ils sont décimés sur le chemin du retour à leur camp et Furiosa est l’unique survivante. Interrogée par le chef de la bande, le lunatique Dementus, elle refuse de lui indiquer l’itinéraire vers l’oasis et ne prononce pas un mot, y compris quand il assassine sous ses yeux sa mère qui avait tenté de la délivrer. Elle est finalement cédée à Immortan Joe, le dirigeant d’une citadelle inexpugnable avec qui Dementus a passé un accord. Tandis qu’elle semble accepter sa situation, elle songe en réalité à se libérer de ses chaînes et à se venger de ses tortionnaires.

J’avais modérément accroché à Mad Max: Fury Road (2015). Il consistait en une longue course-poursuite visuellement splendide, doté d’une intrigue rachitique qui survolait un univers potentiellement riche. Furiosa apporte des éclairages bienvenus. Ecrit avant Fury Road, George Miller avait fourni le script à Charlize Theron pour l’aider à comprendre son personnage. Il aurait dû être réalisé dans la foulée mais des soucis juridiques avec la Warner repoussèrent le projet. Cinq ans s’écoulèrent, Charlize Theron trop vieille pour interpréter la jeune Furiosa fut remplacée par Anya Taylor-Joy. L’Australien Chris Hemsworth, fan de Mad Max, fut sélectionné pour incarner Dementus. L’acteur jouant Immortan Joe étant décédé en 2020, George Miller envisagea de le supprimer de son récit avant que Lachy Hulme reprenne le rôle.
Si les scènes d’action soutiennent difficilement la comparaison avec Fury Road, j’ai préféré Furiosa en raison de sa densité narrative, bien supérieure à la moyenne des blockbusters contemporains (hein Denis Villeneuve…). Il y a certes des baisses de rythme, Chris Hemsworth en fait des tonnes et c’est parfois étonnamment bavard. Cela reste cependant fort plaisant, du grand spectacle de qualité devenu rare de nos jours. Cela m’incite à réévaluer Fury Road, qu’il faudrait que je revois dans la version Black & Chrome réputée meilleure que celle sortie au ciné.


Dream Scenario de Kristoffer Borgli (2023)
Paul Matthews est un professeur de biologie aigri, qui n’a jamais réussi à se consacrer à la recherche ou à rédiger un livre sur son domaine de prédilection, les fourmis. Marié, père de deux filles, il mène une existence calme et routinière. Un de ses enfants lui raconte qu’elle rêve de lui depuis quelques nuits, il apparaît en arrière-plan sans agir. Des proches lui parlent d’une expérience similaire, le phénomène prend de l’ampleur et des milliers de personnes qui ne le connaissent pas le voient en songe, toujours en témoin passif.

Le principe est amusant, digne d’un Spike Jonze. Nicolas Cage adopte un jeu effacé plus subtil qu’à son habitude, dans la lignée de Pig (2021), avec un look à la Paul Giamatti. Il a pensé à un moment arrêter sa carrière après Dream Scenario, l’envie lui est vite passée et il a déjà enchaîné une dizaine de titres...
La mise en place est intrigante et il y a de bonnes trouvailles. Kristoffer Borgli se moque notamment du concept de cancel culture, montrant comment un héros détestable et égocentrique s’enferme dans le déni et invoque une notion douteuse pour rejeter la faute sur les étudiants. C’est aussi une des limites de Dream Scenario, Paul Matthews est tellement antipathique qu’on ne compatit guère à ses malheurs. L’idée de départ finit en outre par tourner à vide, avec des séquences répétitives et un dénouement peu convaincant. Le tout ne tient la route que grâce à la présence de Nicolas Cage, qui ajoute une pierre supplémentaire à son imprévisible filmographie.


ルート225 [Rûto 225] de Yoshihiro Nakamura (2006, Route 225)
En rentrant chez eux en fin d'après-midi, Eriko et son frère Daigo se retrouvent soudain au bord de la mer alors que leur ville est située en pleine terre. Ils croisent ensuite une ancienne camarade de classe de Daigo décédée dans un accident de voiture quelques années auparavant. Ils rebroussent chemin terrifiés, refont le parcours en sens inverse et parviennent à retourner à leur maison. Leurs parents sont absents et ils vont se coucher. Le lendemain, ils se rendent compte que des détails ne collent pas et comprennent qu’ils ont atterri dans un monde parallèle.

Route 225 est tiré d’un roman de 2002 de Chiya Fujino, une femme trans habituée des fictions un peu hors norme axées sur des marginaux. L’adaptation est signée Yoshihiro Nakamura, un spécialiste des récits retors et manipulateurs. Il propose ici une narration relativement sobre focalisée sur deux enfants correctement interprétés par Mikako Tabe (Eriko, que Yoshihiro Nakamura réemploiera dans Fish Story (2009)) et Iwata Chikara (Daigo). C’est le premier opus non horrifique de Yoshihiro Nakamura, doté d’un budget rachitique et d’une photographie cheap effectuée par le débutant Takashi Komatsu.
Tandis que la mise en place laisse supposer que l’on va naviguer entre les univers parallèles, l’histoire se stabilise rapidement pour se concentrer sur le ressenti d’Eriko et Daigo, sur leur relation et leur manière de gérer la disparition de leurs parents. Il ne se passe pas grand-chose mais l’ambiance mélancolique est réussie et les personnages sont attachants. Cela donne un joli film sur le passage à l’âge adulte, avec une conclusion inattendue.


Films vus seuls
ザ・テンプターズ 涙のあとに微笑みを [Za temputazu: Namida no ato ni hohoemi o] de Seiichirô Uchikawa (1969, The Tempters: Smile After Tears)
Kenichi est un garçon solitaire qui vit avec sa mère et travaille dans un supermarché après l’école. Ses seuls compagnons sont les pigeons dont il s’occupe. Pour soigner une de ses bêtes malades, il accepte de chanter sur scène pour une compétition et bat un caïd qui tue son oiseau en représailles. Il se lie à cette occasion avec des collègues du magasin avec qui il forme un groupe de musique, The Tempters.

The Tempters fut un groupe de pop japonais actif de 1967 à 1970. Za temputazu: Namida no ato ni hohoemi o est leur unique apparition commune au cinéma, à une époque où ce genre était à la mode au Japon, influencé par l’exemple des Beatles (cinq longs métrages entre 1964 et 1970) ou The Monkeys (Head en 1968). Il marque les débuts de Ken'ichi Hagiwara (Kenichi) et de Hiroshi Ôguchi (le batteur), qui connaitront sur grand écran une carrière plus durable que leur brève participation à The Tempters (Ken'ichi Hagiwara jouera ainsi un rôle important dans Kagemusha en 1980).
Bien que l’objectif soit essentiellement de caser huit tubes, notamment leur fameux The Legend Of Emerald, il y a une intrigue, une touche de drama et des interprètes potables. Cela tient apparemment davantage la route que Za taigâsu: Sekai wa bokura o matteiru (1968) de leur concurrent The Tigers, une autre bande de chanteurs pop à la coupe au carré. La musique n’est pas désagréable, ça se regarde sans déplaisir sans casser trois pattes à un canard.

Des garçons dans le vent avec leur coupe au carré


Santo y Blue Demon contra los monstruos de Gilberto Martínez Solares (1970, Santo and Blue Demon versus the Monsters)
Un scientifique fou, Bruno Halder, est ramené à la vie par son assistant et décide de se venger de son frère Otto et de sa nièce Gloria qui avaient refusé de mener eux-mêmes l’expérience. Il les fait enlever par ses sbires, une galerie de monstres ressuscités par ses soins (une momie, un cyclope, une créature de Frankenstein, un loup-garou et un vampire). Gloria est heureusement protégée par son petit ami Santo, contre qui Bruno Halder a également une dent. Le rascal capture Blue Demon et en crée un clone maléfique pour se débarrasser de Santo.

Ce Santo s’ouvre sur un combat de catch féminin, sport qui bénéficiait d’une certaine popularité au Mexique et qui est au cœur de Las luchadoras, quatre titres dirigés par René Cardona dans les années 60. Santo y Blue Demon contra los monstruos a été tourné dans la foulée de Santo contra Blue Demon en la Atlántida (1970) avec une équipe similaire. Comme souvent dans ce genre de cas, ce second volet comporte beaucoup de remplissage et reprend partiellement la logique du précédent, avec Blue Demon encore une fois obligé d’attaquer Santo. On a de nouveau un numéro musical extrait d’un autre film, Yo quiero ser artista (1958), produit par le spécialiste du recyclage Jesús Sotomayor Martínez, et un générique complet en introduction et en conclusion. La majorité des monstres ne sert pas à grand-chose, c’est très fauché et franchement crétin.


Андриеш [Andriesh] de Yakov Bazelyan & Sergei Parajanov (1954, Andriech)
Andriesh est un jeune berger dans un village moldave. En sortant ses moutons, il croise dans la montagne son héros, Voinovan, qui lui confie sa flute magique. Dans la soirée, lors d’une fête, un sorcier diabolique enlève la fiancée de Voinovan et déclenche une tempête noire, qui détruit la musique et la joie dans les cœurs. Elle provoque l’éparpillement du troupeau d’Andriesh, contraint de se lancer dans une quête pour les récupérer.

Andriesh est à l’origine un poème de l’écrivain moldave Emilian Bucov inspiré de contes traditionnels de son pays. C’est le premier long métrage de Sergei Parajanov, version étirée de son court de fin d’études mis en scène avec son camarade Yakov Bazelyan à l’Institut national de la cinématographie de Moscou (VGIK). Il a été réalisé quasi-exclusivement en studio, avec de nombreux effets visuels, et annonce les chefs d’œuvre de Parajanov de la décennie suivante par son merveilleux, son ancrage dans le folklore local et l’importance accordée aux aspects esthétiques.
Je connais mal Parajanov, je me souviens seulement que je n’avais pas accroché à Sayat Nova : La Couleur de la grenade (1969), splendide mais soporifique. En dépit de défauts classiques du cinéma soviétique, compassé et théâtral, j’ai préféré Andriesh avec sa structure de conte et son vaillant petit berger. C’est bref (à peine une heure), destiné à un public enfantin et j’ai trouvé cela sympathique.


Dust Devil de Richard Stanley (1992, Le souffle du démon)
Dans le désert de Namibie, un vagabond solitaire accomplit régulièrement des massacres rituels sur les corps de voyageurs cueillis sur la route. Doué de pouvoirs surnaturels, les shamans prétendent qu’il s’agit d’un démon du vent. Mukurob est un flic cynique d’un bled paumé, seul noir parmi les policiers blancs, qui ne croit pas aux superstitions de son ami Joe le sangoma. L’accumulation d’évènements étranges va le pousser à revoir sa position, avec l’aide involontaire de Wendy, la prochaine victime.

Richard Stanley est un cinéaste sud-africain surtout célèbre pour son récent Color Out of Space (2019) avec Nicolas Cage. Dust Devil ne dispose pas du même budget, tourné dans une Namibie fraichement indépendante, avec une photographie très téléfilm et sans star. Charcuté à sa sortie par le distributeur américain Miramax qui voulait une espèce de Silence des agneaux (1991) dans le désert, Richard Stanley put remettre la main sur le négatif et effectuer son propre montage (mouture critiquée ici).
Bien qu’influencé par l’histoire vraie d’un serial killer namibien, Dust Devil présente d’emblée une tournure fantastique, le tueur n’étant clairement pas humain. Le problème principal est la fadeur de Robert John Burke en psychopathe. Ce type de scénario mince nécessite d’être porté par des interprètes charismatiques pour fonctionner, à l’instar de The Hitcher (1986) avec un terrifiant Rutger Hauer. Si Zakes Mokae (aperçu dans The Serpent and the Rainbow (1988)) est convaincant en enquêteur tourmenté, Chelsea Field est quelconque en Wendy et Robert John Burke n’est pas à la hauteur, jamais impressionnant ou effrayant. Combiné au manque patent de moyens, à des séquences sur le mari de Wendy qui ne servent à rien (on n’est pourtant pas dans Silent Hill) et à une conclusion ratée, on obtient un objet inabouti qui n’exploite pas son potentiel.


Careful de Guy Maddin (1992)
Dans les montagnes, le moindre bruit pouvant provoquer une avalanche, les gens sont obligés de chuchoter et de se cacher pour chanter ou exprimer leur joie. Trois frères vivent dans une maisonnette avec leur jolie mère Zenaida : l’aîné Franz est muet et paralysé, abandonné dans le grenier et renié par Zenaida ; le cadet Johann est le chouchou, promis à la belle Klara ; Grigorss, le benjamin, apprenti majordome comme Johann, jalouse ce dernier et est épris en secret de Klara. Le soir de ses fiançailles, Johann fait un rêve érotique où l’image de Klara est remplacée par celle de sa mère. A son réveil, ce désir enfoui devient une obsession qui va condamner leur famille.

Je connais peu l’œuvre du Canadien Guy Maddin, j’ai uniquement vu Archangel (1990) il y a de nombreuses années, un truc esthétisant, bizarre et creepy. Cette description s’applique parfaitement à Careful, hommage au Bergfilm (= film de montagne) allemand des années 20 sur fond d’inceste, quasi-muet à cause du risque d’avalanches, avec des couleurs évoquant les bobines teintées. C’est extrêmement malaisant, avec un humour noir parfois de mauvais goût, une maigre intrigue empreinte de références à la psychanalyse et des décors surchargés souvent expressionnistes. La seconde moitié s’embourbe dans la tragédie sans poursuivre ses innovations, les personnages sont tous antipathiques et cela a fini par m’agacer.


学校の怪談2 [Gakkô no kaidan 2] de Hideyuki Hirayama (1996, Haunted School 2)
Un groupe d’enfants de Tokyo est en voyage scolaire à la campagne durant les vacances de printemps. Un soir, un prêtre leur raconte que l’école à proximité est hantée et qu’il faut absolument éviter d’être à l’intérieur le 4 avril à 4h44 (le chiffre 4 étant homophone de mort dans sa prononciation on’yomi en japonais). Le lendemain tombe justement le 4 avril et, par un concours de circonstances, six gosses se retrouvent coincés dans l’établissement à l’heure fatidique, accompagnés d’un pilleur de temples en fuite. Ils vont devoir échapper à divers esprits facétieux.

En 1973, une interprétation des prophéties de Nostradamus écrite par le journaliste Tsutomu Gotô prévoyant l’apocalypse en 1999 se vend à plus d’un million d’exemplaires et engendre ce qui sera appelé le premier boom occulte. Après une pause dans les années 80, un second boom surgit dans les années 90, caractérisé notamment par la propagation des histoires de fantômes dans les écoles. Une série de livres et de mangas surfent sur la vague et inspirent en 1995 Gakkô no kaidan, un film d’horreur pour enfants de la Tôhô jouant sur la fibre nostalgique pour attirer également les parents, avec des trucages à l’ancienne et des évènements situés dans une école traditionnelle en bois. Devant le succès rencontré, la Tôhô finance trois suites. Bien que n’ayant aucun lien narratif avec le précédent, Gakkô no kaidan 2 a été tourné avec la même équipe, certains acteurices réapparaissant dans des rôles différents. Les images de synthèse ont en revanche été largement utilisées, d’une façon pas toujours judicieuse.
J’avais un bon souvenir du 1 et j’ai galéré pour récupérer ce second épisode avec des sous-titres. Il est encore plus gentillet, c’est vraiment destiné à un jeune public. Les effets spéciaux sont variables, de corrects à moches. La trame n’est pas d’une folle originalité, copier/coller approximatif du premier : un prétexte pousse les mômes à entrer dans le bâtiment, des phénomènes surnaturels se produisent, tout le monde réussit à s’évader, fin. Ça passe le temps, je regarderai le 3 et le 4 par curiosité.


Livres
L'homme sans visage de Jack Vance (Presses Pocket, collection « Science-Fiction »,1980), 222 p.
Sur la planète Durdane dans le pays de Shant, les humains sont dirigés par un mystérieux homme sans visage, qui contraint violemment les habitants à respecter les lois de leur contrée. Ceux-ci doivent porter en permanence autour du cou une sorte de foulard, un torc, qui indique la profession et le statut. Cet objet est muni d’une charge explosive, les contrevenants à l’autorité risquant la décapitation. Le jeune Mur grandit dans une communauté rigoriste dans laquelle les femmes sont réduites en esclavage. Très attaché à sa mère, il n’accepte pas ce système, il voudrait s’enfuir avec elle et être musicien comme son père, un voyageur de passage qu’il n’a jamais rencontré. Mais comment se rebeller dans cette société sclérosée par un pouvoir invisible ?

L'homme sans visage est le premier volet de la trilogie des Chroniques de Durdane. On est dans un pur roman d’aventures à la Vance sur un astre exotique, dans un univers insolite peuplé d’ethnies bigarrées dotées de technologies singulières, axé sur le récit initiatique d’un héros vagabond. A partir du moment où Mur devenu Gastel Etzwane perd ses illusions et tente de découvrir l’identité de l’homme sans visage, le bouquin fonctionne moins bien et le dernier tiers m’a laissé sur ma faim. Espérons que ça redémarre dans le volume 2.

100 ans d’histoire des Portugais en France de Marie-Christine Volovitch-Tavares (Michel Lafon, 2016), 192 p.
L’historienne spécialiste de l’immigration portugaise Marie-Christine Volovitch-Tavares découpe son travail en cinq parties :
• Les prémices de l’immigration portugaise et le tournant de la Grande Guerre, qui permet un premier accord sur la main d’œuvre.
• La stagnation de 1926 à 1945 avec l’arrivée de Salazar et l’impact de la Deuxième Guerre Mondiale.
• La reprise des années 50 et l’explosion des années 60 sous l’œil complaisant de l’Etat français qui laissa les Portugais s’entasser dans des bidonvilles.
• Les conséquences de la révolution des œillets du 25 avril 1974 sur la vie des centaines de milliers d’immigrés installés en France.
• L’entrée du Portugal dans la Communauté Européenne en 1986 ainsi que la situation des immigrés et de leur descendance dans les années 2000.
Alors que les Portugais sont depuis les années 60 dans le top 3 des étrangers les plus nombreux dans l’hexagone, peu d’études leur sont consacrées excepté quelques articles pointus et recueils de témoignages. Marie-Christine Volovitch-Tavares a été une des premières à proposer des livres abordables pour le grand public et à mettre sur la table les questions qui fâchent à l’exemple de son classique de 1995, Portugais à Champigny, le temps des baraques. Elle offre ici un ouvrage facile d’accès et richement illustré qui récapitule les phases majeures de l’Histoire de l’immigration des Portugais en France. Etant directement concerné, je n’ai pas appris grand-chose mais cela reste un excellent survol qui revient à la fois sur les aspects politiques, sociaux et culturels de cette immigration durant un siècle. C’est une référence incontournable sur le sujet, en attendant une analyse plus détaillée (Victor un jour si tu as le temps :-)).


Revues
Les Cahiers du cinéma n°815 – Décembre 2024
Qui dit fin d’année dit saison des marronniers. En décembre aux Cahiers du cinéma, ce sont les tops et bilan de l’année. Comme d’habitude, ça ne m’a guère passionné. Le texte sur les défis qui pèsent sur le sous-titrage professionnel est bien plus intéressant, il montre un domaine situé au bout de la chaîne de production miné par un manque de considération et menacé par l’amélioration des logiciels de traduction automatique et par l’arrivée de l’IA sur le marché.

Du côté des sorties, je note la chronique familiale douce-amère Noël à Miller’s Point ; Eephus, le dernier tour de poste centré sur un match de baseball ; la comédie canadienne Une langue universelle dans laquelle le persan est devenu la langue dominante au Canada ; Banzo, critique du colonialisme portugais au Mozambique au XIXe siècle ; le dangereux Fotogenico, une comédie loufoque potentiellement lourdingue ; Nosferatu de Robert Eggers, le metteur en scène du sympathique The Witch (2015) et de l’énervant The Lighthouse (2019), qui semble encore une fois très (trop ?) stylisé ; My Sunshine, un film japonais sur des patineurs artistiques ; et Les tempêtes, du fantastique français dans le désert algérien.
En cinéma de patrimoine, je découvre l’existence de Matilde Landeta, une réalisatrice mexicaine des années 50. Je jetterai peut-être un œil à son œuvre même s’il y a apparemment des trucs qui piquent (moralisme, racisme, blackface…). Je remarque également Domas le rêveur (1973), une fantaisie pour enfants lituanienne, et il faudra que je récupère le coffret Carlotta sur Otar Iosseliani qui vient de paraître.


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