samedi 21 octobre 2023

Carnet de bord 14/10/2023-20/10/2023



Films vus en compagnie
The Wonderful Story of Henry Sugar de Wes Anderson (2023, La merveilleuse histoire d'Henry Sugar)
Poison de Wes Anderson (2023, Venin)
The Rat Catcher de Wes Anderson (2023, Le preneur de Rats)
The Swan de Wes Anderson (2023, Le cygne)
Henry Sugar est un riche rentier qui dilapide son argent dans les casinos. Il tombe un jour dans la bibliothèque familiale sur un petit livre écrit par un médecin indien traitant du cas d’Imdad Khan, un homme capable de lire avec les yeux bandés et de deviner l’envers des cartes à jouer.
Harry Pope est allongé sur son lit sans bouger le moindre cil car un serpent extrêmement venimeux s’est endormi sur son ventre sous son pyjama. Un médecin indien est mandé en urgence.
Dans un village anglais, un chasseur de rats est appelé à la rescousse pour éliminer les rongeurs des environs.
Un adolescent est torturé par deux affreux camarades braconniers et est obligé de se plier à leurs jeux pervers.

Après Fantastic Mr. Fox en 2009, Wes Anderson profite d’une proposition de Netflix, qui a acquis les droits d’exploitation de l’intégralité de l’œuvre de Roald Dahl, pour se repencher sur cet auteur qu’il apprécie. Il souhaitait au départ transposer uniquement Henry Sugar, dont la narration contée l’avait marqué. Pour la restituer, il employa un procédé inédit où un personnage face caméra débite le texte d’origine, y compris les descriptions et les didascalies. Il s’amusa également avec des décors volontairement factices et théâtraux, modifiés de façon visible par des accessoires au cours de l’action. The Wonderful Story of Henry Sugar ne durant que 37 minutes, il réalisa en complément trois courts métrages de 17 minutes chacun tirés d’histoires qui pouvaient bénéficier d’un développement identique.
Wes Anderson continue d’explorer le concept de récits imbriqués et de distanciation par rapport à son sujet, déjà très présent dans The French Dispatch (2021) et Asteroid City (2023). Si l’idée derrière Henry Sugar & co est intéressante, elle s’avère rapidement lassante passé l’effet de surprise, et de moins en moins probante à mesure qu’on regarde les volets suivants. Visuellement, c’est un modèle de précision et d’inventivité, fourmillant de mille détails et transitant avec fluidité entre les séquences. Henry Sugar est le plus sophistiqué sur ce plan et les articulations entre les intrigues sont parfaitement maîtrisés. Il manque cependant quelque chose, j’en attendais davantage, je me suis ennuyé devant cet exercice stylistique qui aurait gagné à s’extraire de son cadre formel glacé pour insuffler un peu d’âme, de sentiment et de folie.


The Fabelmans de Steven Spielberg (2022)
Dans la banlieue de Philadelphie dans les années 50, un couple juif de classe moyenne, Burt et Mitzi Fabelmans, emmènent leur fils Sammy au cinéma pour la première fois. Le garçon est fasciné et tente aussitôt de reproduire l’accident de train qu’il a vu à l’écran. Sa mère, brillante pianiste bridée par la vie conjugale, approuve son engouement et l’encourage à utiliser la caméra 8 mm de Burt. Celui-ci estime que Sammy devrait abandonner ce vain hobby et n’a pas conscience des problèmes qui s’accumulent dans son foyer.

Depuis l’abominable Indiana Jones and the Kingdom of the Crystal Skull (2008), Steven Spielberg me laisse dubitatif et j’ai loupé quatre de ses sorties. The Fabelmans se démarque toutefois des gros machins indigestes type Ready Player One (2018) par son aspect intimiste et autobiographique jusque dans son titre, Fabelmans, l’homme des fables en allemand, renvoyant au spiel de Spieberg, discours, boniment en yiddish. Spielberg retrouve ici sa vocation initiale de formidable raconteur d’histoires en rendant hommage à sa mère, lui qui s’est concentré dans sa carrière sur les figures de père. On voit en outre l’importance que le cinéma a eu dans son existence, comment il a façonné tout son être dès son enfance, lui a permis de comprendre le drame familial ou d’amadouer un ennemi. Le projet de The Fabelmans trottait dans la tête de Spielberg de longue date et il hésitait à aborder ce passé sensible pour son entourage. Le décès de sa mère en 2017 et de son père en 2020 ont été les évènements déclencheurs.
The Fabelmans n’est pas d’une grande originalité dans le contexte actuel où revisiter sa jeunesse est à la mode, cf. par exemple Apollo 10 ½: A Space Age Adventure (2022) et Armageddon Time (2022). Cela demeure néanmoins un beau film où Spielberg renoue avec une sincérité et une simplicité qu’il avait oublié.


미드나이트 [Mideunaiteu] de Oh-Seung Kwon (2021, Midnight Silence)
En rentrant chez elle accompagnée de sa mère sourde et muette comme elle, Kyung-mi aperçoit une femme blessée au ventre, qui vient d'être agressée et lui demande de l’aide. Son assaillant est malheureusement à proximité, il se précipite sur Kyung-mi et elle s’échappe de justesse. S’ensuit une course-poursuite effrénée entre Kyung-mi et un tueur retors qui profite de ses handicaps.

Mideunaiteu est le premier long métrage de Oh-Seung Kwon, qui occupe aussi le poste de scénariste. La trame est extrêmement classique, un serial-killer qui cavale derrière une victime récalcitrante. L’unique singularité est la surdité et le mutisme de l’héroïne. Je m’étonne d’ailleurs qu’en 2021 elle n’ait pas d’application text to speech sur son smartphone ou un truc de ce goût-là pour lui faciliter son quotidien. D’une manière générale, Mideunaiteu est bourré d’incohérences, est ultra convenu et n’est aucunement crédible. Il repose entièrement sur son action quasi continue, en espérant que le public ne s’arrête pas sur les détails. Arrive un moment où ma mansuétude atteint ses limites. Oh-Seung Kwon n’exploite même pas correctement son concept pour créer du suspense, le spectateur n’est jamais mis dans la peau de Kyung-mi, il sait en permanence où est le tueur et ce qu’il est en train de préparer. Dans le genre serial-killer, la Corée du Sud a fait bien mieux et Mideunaiteu n’apporte rien de neuf.


तुम्बाड [Tumbbad] de Rahi Anil Barve (2018)
En 1918 à Tumbbad, endroit reculé où le ciel déverse sans cesse des trombes d’eau en raison d’une ancienne malédiction, une femme et ses deux garçons, Vinayak et Sadashiv, vivent en paria dans une bâtisse isolée. Ils sont contraints de nourrir la mère du chef du village, une affreuse sorcière enchaînée à un mur qui a constamment faim et qui s’endort quand on lui récite une étrange formule. Lorsque le chef décède, ils décident de s’enfuir en abandonnant la vieille. Quinze ans s’écoulent, Vinayak revient à Tumbbad pour récupérer un trésor mythique qui serait dissimulée aux alentours.

Je n’y connais pas grand-chose en cinéma hindi et on m’a récemment recommandé Tumbbad, qui possède le rare avantage de ne pas avoir une durée excessive. Son rythme lent, son budget restreint, son absence de star et de numéros chantés le rendent atypique pour Bollywood, et il n’a pas attiré les foules à sa sortie. Sa production s’est étalée sur six ans, un montage initial achevé en 2015 n’ayant pas donné satisfaction et ayant engendré de nouvelles prises de vues. S’il s’ouvre sur des images de synthèse moches, Tumbbad s’écarte vite de ces mauvais effets par l’utilisation de maquillages old school globalement réussis, d’une superbe lumière naturelle et d’impressionnants décors et paysages de mousson. Seule la musique du compositeur de jeux vidéo Jesper Kyd détonne, trop grandiloquente et souvent déphasée.
Tumbbad est composé de trois chapitres : la jeunesse de Vinayak en 1918 ; son retour à Tumbbad en 1933 ; et la relève assurée par son fils en 1947. Le premier est selon moi le meilleur, un conte qui aurait pu être tourné par un Sam Raimi indien. Les deux autres alternent entre Tumbbad et Pune, la ville où habite Vinayak. J’ai été moins convaincu par ces éléments citadins et les problèmes conjugaux de Vinayak. La conclusion nous replonge dans le cœur de l’intrigue et Tumbbad est une belle découverte, davantage que Bulbul (2020) qui ne m’avait pas emballé.


Films vus seuls
The Circle de Frank Borzage (1925)
Une femme s’enfuit avec un ami de son mari, laissant à ce dernier leur garçon Arnold. Trente ans plus tard, Arnold a grandi et l’histoire risque de se répéter, son épouse Elizabeth songeant à le quitter pour un playboy. Souhaitant au préalable rencontrer la mère d’Arnold, elle l’invite dans leur demeure pour découvrir ce qu’elle est devenue et si elle regrette son geste.

Acteur promu réalisateur en 1915, Frank Borzage dirigea deux titres mineurs pour la MGM en 1925, cinq ans après le succès d’Humoresque (1920) et juste avant son entrée à la Fox où il mit en scène certains de ses meilleurs opus, en particulier 7th Heaven (1927) et Lucky Star (1929). Adapté d’une pièce de Somerset Maugham, The Circle est une comédie théâtrale, en intérieur avec un petit nombre de décors et de protagonistes. Si on est clairement dans du pré-code, avec des compagnes volages pas franchement punies, ça n’en reste pas moins gentillet, manquant de péripéties. Borzage n’avait apparemment pas été enthousiasmé par le projet et ça se voit, il assure le service minimum. Le héros est insipide et seule Eleanor Boardman en Elizabeth se démarque. A noter une apparition de Lucille Le Sueur, créditée pour la première fois sous le nom de Joan Crawford.


どたんば [Dotanba] de Tomu Uchida (1957, The Eleventh Hour)
De fortes pluies combinées à une faiblesse dans la structure entraîne l’effondrement d’une modeste mine près de Nagoya, bloquant cinq ouvriers dans un tunnel. Les équipes de secours dépêchées sur place se heurtent à des difficultés techniques et des dissensions apparaissent rapidement entre les experts du ministère du travail, les mineurs japonais et coréens. Pendant ce temps, les réserves d’air des individus coincés s’amenuisent, diminuant progressivement leurs chances de survie.

Dotanba est un remake d’un téléfilm inspiré de faits réels diffusé en direct un an auparavant sur la chaîne NHK. Tomu Uchida, aidé par Shinobu Hashimoto, scénariste récurrent d’Akira Kurosawa, modifia toutefois l’angle d’approche : au lieu de se focaliser sur les mineurs, il s’attarde sur les tensions et complications autour du sauvetage. Il n’y a pas vraiment de héros, plutôt une multitude de protagonistes qui ont chacun leur importance et leurs défauts. Le patron, responsable d’une réduction des frais de maintenance qui a fragilisé la construction, s’excuse en permanence sans agir, les employés du gouvernement sont méprisants, les sauveteurs ne sont pas toujours motivés et les familles des victimes se préoccupent des compensations financières tandis que le sort de leurs proches est encore incertain. Le racisme envers les zainichi (les Coréens du Japon), sujet hautement tabou, est abordé, sans idéaliser outre mesure ces derniers qui n’hésitent pas à déserter quand on les insulte, au risque de laisser mourir les collègues en danger.
Uchida a travaillé dans les mines en Chine à la fin de la guerre et y perdit en partie sa santé (sur Uchida, je conseille l’excellent site anglophone The International Uchida Tomu Appreciation Society). Dotanba est, avec La terre (1939), son œuvre la plus réaliste. Il s’attache de façon linéaire et détaillée au processus de sauvetage dans un noir et blanc granuleux. La musique quasi hollywoodienne, le foisonnement de péripéties et un épilogue étonnamment optimiste plombe en revanche le naturalisme de l’ensemble. Takashi Shimura, qui a l’air de camper un rôle clé, disparaît soudain et on a parfois l’impression qu’Uchida oscille entre deux démarches, entre spectacle et documentaire. En dépit de ce côté bancal, c’est assez prenant et bien exécuté.


Veneno para las hadas de Carlos Enrique Taboada (1986, Poison for the Fairies)
Dès son arrivée dans sa nouvelle école, Flavia tombe sous la coupe de Veronica, orpheline mythomane et tyrannique qui pense être une sorcière. D’abord sceptique, Flavia change d’avis lorsque sa professeure de piano meurt d’une crise cardiaque peu après une cérémonie vaguement démoniaque organisée par sa camarade. Veronica en profite pour obliger son « amie », qui la craint et n’ose la contredire, à suivre ses ordres et désirs.

Scénariste réputé, Carlos Enrique Taboada commença sa carrière à la télévision mexicaine dans les années 50. Il attendit une dizaine d’années avant de passer derrière la caméra et n’exerça ce poste que vingt ans, de 1964 à 1984 (terminé en 1984, Veneno para las hadas ne sortit qu’en 1986). Il est surtout célèbre pour ses films d’horreur centrés sur des personnages féminins, empreints d’un romantisme gothisant et de postures anticléricales. L’exemple le plus fameux est Hasta el viento tiene miedo (1968) et Veneno para las hadas se situe dans une veine similaire. Dès l’ouverture, un choix esthétique frappe immédiatement : les visages des adultes ne sont jamais montrés, ce sont des figures distantes et tout est tourné du point de vue des fillettes avec une caméra en position inhabituellement basse.
A l’instar de Hasta el viento tiene miedo, je n’ai que moyennement apprécié Veneno para las hadas. L’ambiance est pourtant adéquatement posée, lugubre et sans esbrouffe, les jeunes interprètes sont convaincantes et la photographie est belle. Mais il y a une espèce de faux rythme, l’intrigue est mince et j’ai fini par décrocher. Il faudra néanmoins que je récupère El libro de piedra (1969) et Más negro que la noche (1975), les deux autres Carlos Enrique Taboada du même acabit.


戦ふ兵隊 [Tatakau heitai] de Fumio Kamei (1939, Les soldats au combat)
En Chine en 1939, l’armée japonaise se bat pour instaurer un nouvel ordre en Asie. On assiste au quotidien des soldats, perpétuellement en mouvement et astreints à un régime sévère plutôt déprimant. Ils affrontent un ennemi lointain et invisible, sous l’œil d’une population effrayée et lasse.

En 1938, Fumio Kamei est envoyé avec le caméraman Shigeru Miki sur le front chinois pour accompagner durant quatre mois un régiment d'infanterie chargé de « libérer » la ville de Wuhan. Au lieu de dépeindre de glorieuses batailles, Kamei, qui a étudié le cinéma en Union Soviétique, s’étend sur la fatigue des militaires et sur la peur des habitants. Il insiste ainsi en vain auprès de Shigeru Miki pour filmer le visage d’un enfant terrorisé et Tatakau heitai énonce dans ses intertitres que les paysans redonnent vie à la terre dès le départ de troupes japonaises montrées comme des envahisseurs. Par crainte de représailles, la Tôhô ne présenta pas Tatakau heitai au comité de censure et le mit au placard. Fumio Kamei fut emprisonné en octobre 1941 par précaution et relâché en août 1942 sans autorisation de tourner. En 1946, il eut encore des ennuis avec un autre documentaire, Nippon no higeki (1946), interdit par l’occupant américain à cause de son approche marxiste et de son regard trop critique sur la responsabilité de l’Empereur pendant la guerre.
Longtemps considéré perdu, Tatakau heitai a été retrouvé en 1975 dans une version de 66 minutes contre 80 minutes à l’origine. La propagande japonaise diffère profondément de l’Occidentale et Tatakau heitai se rapproche de Terre et soldats (1939). Néanmoins, les éléments clés qui faisaient du film de Tasaka Tomotaka une vraie œuvre de propagande sont absents et il est facile de comprendre pourquoi Tatakau heitai n’a pas été diffusé à l'époque. Il n’y a rien qui valorise le Japon ou sa puissance de frappe, Fumio Kamei préfère s’attarder sur les Chinois contraints de subir le passage de l’armée ou sur un cheval abandonné. Toutefois, si Tatakau heitai forme un témoignage captivant pour l’Historien, il rebutera le profane, notamment en raison d’une étrange séquence d’une dizaine de minutes qui rapporte les discussions entre un officier et ses hommes. La scène, pitoyablement reconstituée par les soldats pour les besoins de la caméra plusieurs jours après la bataille, est longue, confuse et j’ai eu du mal à en discerner l’intérêt. De façon amusante, Fumio Kamei déclara ne pas être pacifiste et avoir respecté les instructions des militaires qui voulaient exposer la réalité de la situation sans le traitement glamour des actualités. Réussite totale sur ce plan, il n’y a pas la moindre touche de glamour dans Tatakau heitai.


開心鬼 [Hoi sam gwai] de Clifton Ko (1984, The Happy Ghost)
Tandis qu’elles campent sur la plage, un groupe de lycéennes est surpris par la pluie et se réfugie dans un temple hanté. Quand l’averse s’arrête, elles repartent et l’une d’elle, Bonnie, récupère une vieille corde qui traine pour attacher ses affaires. De retour dans sa chambre, le fantôme d’un fonctionnaire de la dynastie Qing apparaît. Il lui explique qu’elle a subtilisé la corde avec laquelle il s’était pendu et lui demande de la ramener au temple. Bonnie accepte avant de se rendre compte qu’un ami capable d’être invisible pourrait lui être bien utile.

Hoi sam gwai est le premier volet d’une série de cinq longs métrages produits entre 1984 et 1991 autour d’un aimable revenant interprété par Raymond Pak-Ming Wong. Il marque les débuts du réalisateur Clifton Ko, spécialiste de la comédie hongkongaise, et a eu un énorme succès en salles pour un budget initial limité. La comédie est un genre difficilement exportable et Hoi sam gwai est peu connu en Occident. Il est moins lourd que les Lucky Stars ou les Pom Pom, régulièrement grivois et pénibles. Si on n’évite pas deux-trois blagues en-dessous de la ceinture ou légèrement homophobes, typique du cinéma HK de cette période, l’humour est dans l’ensemble gentil, avec une trame axée sur les étudiantes et leurs problèmes. Elles sont incarnées par des actrices novices convaincantes, épaulées par un Raymond Pak-Ming Wong qui cabotine à fond les ballons. Ce n’est pas désagréable et je jetterai sans doute un œil aux chapitres suivants.


Séries
ピンポン THE ANIMATION [Pinpon the Animation] de Masaaki Yuasa (2014, Ping Pong the Animation), 11 épisodes
Peco et Smile sont deux amis d’enfance passionnés de ping pong, inscrits au club du lycée. Fanfaron extraverti, Peco est persuadé d’être imbattable et souhaite devenir professionnel. Smile est à l’inverse complètement introverti et ne pratique que pour passer le temps, n’exploitant pas ses capacités. Peco se repose sur ses lauriers et a été distancé par Smile, qui n’ose pas lui montrer qu’il est meilleur que lui. L’arrivée dans une école rivale du Chinois Kong Wenge, ancien membre de l’équipe nationale de son pays, change la donne, Peco se faisant écraser lors d’un match d’entrainement contre lui.

Ping Pong est un manga de Taiyô Matsumoto, l’auteur d’Amer Béton, publié dans le magazine Big Comic Spirits entre 1996 et 1997. J’avais vu l’adaptation cinématographique de 2002 et j’avais zappé l’existence de cet animé de 2014 jusqu’à mon récent visionnage de Inu-Oh (2021), deuxième collaboration entre Taiyô Matsumoto et Masaaki Yuasa. Appréciant le travail de ce dernier, j’ai décidé de regarder l’animé même si le film ne m’avait pas emballé. Il faut dire que je m’attendais à un Ganbatte eiga et que Peko y était hautement agaçant.
Si Peko reste énervant dans la version de Masaaki Yuasa, son importance est diluée sur les onze épisodes et Smile est plus central. Les matchs de ping pong sont davantage développés, magnifiés par le style unique de Masaaki Yuasa. Le délire graphique est le gros point fort de Ping Pong the Animation, le scénario et les personnages se conformant en revanche à certains clichés du manga de sport. Je n’irai donc pas lire le manga de Taiyô Matsumoto mais l’animé est un incontournable pour les amateurs de Masaaki Yuasa.


Livres
Paradoxe perdu de Fredric Brown (J’ai lu, 1977), 189 p.
Paradoxe perdu réunit 14 nouvelles de 2 à 32 pages de Fredric Brown écrites entre 1943 et 1963. Elles possèdent toutes un ton moqueur, jouent souvent sur les mots, et la plupart ne visent qu’à amener à une chute variablement prévisible. On y croise des extra-terrestres bienveillants ou indifférents, une machine à voyager dans le temps, un imprésario omniscient ou un solipsiste.

Je persiste sur Fredric Brown jusqu’à épuisement du stock présent dans ma bibliothèque, qui date de l'époque lointaine où j’achetais à la pelle en bouquinerie. Malheureusement, après le sympathique Martiens, go home !, les défauts constatés précédemment dans Fantômes et farfafouilles ressurgissent. Si on évite dans l’ensemble les aspects graveleux et misogynes, l’humour tombe toujours autant à plat, pas aidé par une traduction qui fait ce qu’elle peut. Les dénouements sont assez nases et on dénote un passéisme de mauvais aloi dans Les Ondulats. Je n’ai plus qu’un livre de Fredric Brown en attente sur mes étagères, espérons qu’il sera mieux que ce pénible Paradoxe perdu.


La hache, le koto et le chrysanthème de Seishi Yokomizo (Gallimard, collection « L’imaginaire », 2013), 364 p.
Dans la préfecture de Tochigi près du lac de Nasu, le riche industriel Sahei Inugami vient de trépasser, laissant derrière lui un mystérieux testament qui ne sera ouvert qu’un mois après sa disparition. Le détective Kôsuke Kindaichi est prévenu par une lettre que des crimes risquent d’être commis et se rend sur les lieux. Dès son arrivée, l’homme qui l’avait alerté est retrouvé mort et le testament révélé s’avère être une grenade dégoupillée. Il va engendrer un enchaînement de meurtres au sein de la famille Inugami.

Publié sous forme de feuilleton dans le magazine King de janvier 1950 à mai 1951, La hache, le koto et le chrysanthème (Le clan Inugami en VO) est un des romans de Seishi Yokomizo les plus adaptés, trois fois sur grand écran et huit à la télévision. J’ai vu la transposition de Kon Ichikawa de 1976 (il en fera un remake en 2006), réputée la meilleure et qui est relativement fidèle à l’intrigue d’origine. Je n’ai donc pas été trop surpris par les évènements et la trame alambiquée vaguement grotesque. A l’inverse du Village aux huit tombes, Kôsuke Kindaichi est ici au cœur du récit et c’est son point de vue qui est adopté. Il passe des mois au village et est incapable d’arrêter la succession de meurtres, ne résolvant l’enquête qu’à la dernière seconde. C’est classique chez lui, le nombre de décès dans ses aventures excédant de beaucoup la moyenne de celles des détectives occidentaux. C’est en tout cas fort distrayant et je vais continuer avec plaisir de lire les Seishi Yokomizo disponibles en français.


Revues
Les Cahiers du cinéma n°802 – Octobre 2023
Pas vraiment de dossier dans ce numéro, qui se concentre sur les sorties d’octobre. Je verrai peut-être un jour Killers of the Flower Moon (2023) de Scorsese mais pas en salles. Outre que ça ne m’attire pas particulièrement, il dure 3h26. Bon sang Martin, t’es pas sur une mini-série là. Sinon, Le règne animal (2023) pique ma curiosité, de la SF à la française dont le thème évoque L'Île du docteur Moreau. Je note par ailleurs L’autre Laurens (2023), polar barré casse-gueule que je pourrais aimer ou détester. Idem pour Sentinelle (2023), comédie policière tournant autour de Jonathan Cohen, acteur en vogue que je ne connais pas. Mentionnons enfin Linda veut du poulet ! (2023), film d’animation de Sébastien Laudenbach et Chiara Malta, celle-ci ayant mis apparemment une touche de folie dans l’univers visuel splendide de Sébastien Laudenbach (La jeune fille sans mains (2016) peinait à s’extirper d’un sentier excessivement balisé).

J’ai été content de lire une interview de John McTiernan, qui n’a pas perdu sa verve en vieillissant. Je ne sais pas si un de ses projets aboutira, sa virulence contre l’industrie hollywoodienne et la droite américaine ne l’aidant pas des masses. Pas grand-chose du côté des ressorties, j’ai déjà vu ce qui serait susceptible de m’intéresser. Je remarque juste la parution de trois livres sur Ozu, que mon complétisme me poussera à acquérir, et le commentaire afférent de Jean-Michel Frodon : il explique comment les cinéphiles des années 70 ont eu du mal à accepter Ozu dans un contexte où les attentes des spectateurs étaient différentes et où ils n’étaient pas préparés à l’altérité unique (et pas spécifiquement japonaise) de ce réalisateur.


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