samedi 4 mai 2024

Carnet de bord 27/04/2024-03/05/2024



Films vus en compagnie
阪妻-阪東妻三郎の生涯 [Ribâ, nagarenaide yo] de Junta Yamaguchi (2023, River)
C’est la morte saison à Kibune, petite ville au nord de Kyôto. Dans le ryokan Fujiya, les clients sont rares, il n’y a que deux amis en plein déjeuner, un écrivain en panne d’inspiration et son éditeur parti se relaxer dans le bain. A la suite d’une brève pause au bord de la rivière, Mikoto, une des serveuses, remonte nettoyer une des chambres. Sa tâche à peine achevée, elle fait de nouveau face au cours d’eau. Passé une phase d’incompréhension, les employés réalisent que l’hôtel est coincé dans une boucle temporelle de deux minutes et qu’ils sont condamnés à revivre les mêmes évènements.

Ribâ, nagarenaide yo est le second long métrage de Junta Yamaguchi après l’excellent Beyond the Infinite Two Minutes (2020). On retrouve entre les deux titres de fortes similarités : le thème du voyage dans le temps ; le casting, avec des interprètes en commun, un producteur, une costumière, un ingénieur du son et un scénariste identiques (Makoto Ueda, déjà à l’origine de Summer Time Machines Blues en 2005) ; une façon de filmer approximative qui compose avec le manque de budget. S’ajoute ici une photographie numérique moche aggravée par un filtre douteux et une romance un peu nulle entre Mikoto et un apprenti cuistot. Ces problèmes sont cependant vite oubliés car on est emporté par le rythme et l’humour bête et gentil typique de Makoto Ueda. L’équipe de Beyond the Infinite Two Minutes réussit encore une fois à apporter un vent de fraicheur au concept de plus en plus galvaudé de boucle temporelle grâce à une utilisation judicieuse du décor de l’auberge et en poussant jusqu’au bout l’idée de départ. Le dénouement est complètement stupide et conclut en beauté cette sympathique comédie.


The Death and Life of Marsha P. Johnson de David France (2017, Marsha P. Johnson : Histoire d'une légende)
Le 6 juillet 1992, le corps de Marsha P. Johnson, militante trans très investie pour la reconnaissance des droits LGBT, fut découvert dans l’Hudson River. Malgré les dénégations des proches, la police considéra que c’était un suicide et l’affaire fut classée sans suite. En 2016, avant sa retraite, Victoria Cruz de l’Anti-Violence Project (une association soutenant les personnes LGBT victimes de violence) décide de se pencher sur le dossier dans l’espoir de l’élucider. Elle rencontre les survivants de l’époque et retrace les derniers jours de Marsha P. Johnson.

Je ne connaissais pas l’histoire de Marsha P. Johnson et du milieu trans américain des années 70 à 90 montré dans ce documentaire. David France s’attarde d’ailleurs autant sur Sylvia Rivera, autre figure majeure du mouvement, que sur Marsha P. Johnson dont la vie est brièvement survolée. Pour les néophytes comme moi, l’aspect historique est intéressant, avec de nombreuses images d’archives et un résumé des moments clés des luttes. Sur la forme en revanche, on est dans du documentaire américain pur jus, avec les étapes attendues, la grosse musique, le suspense, l’enquête qui au final n’amène pas grand-chose… Avec un tel matériel, il y avait moyen de bâtir un récit plus captivant.


Linda veut du poulet ! de Sébastien Laudenbach & Chiara Malta (2023)
Linda est élevée par sa mère célibataire Paulette dans une cité. Un soir, elle est punie pour un méfait qu’elle n’a pas commis et est envoyée chez sa tante. Quand Paulette se rend compte de son erreur, elle va immédiatement chercher Linda et lui accorde un souhait pour se racheter. La petite fille demande à sa mère de lui préparer un poulet aux poivrons à la romaine, le plat préféré de son père décédé. Le lendemain, à cause d’une grève, tous les magasins sont fermés. Comment dès lors récupérer le poulet nécessaire à la recette ?

Linda veut du poulet ! est le second long métrage de Sébastien Laudenbach après La Jeune Fille sans mains (2016), qui était techniquement splendide mais avec une intrigue insipide et convenue. Il est cette fois associé à Chiara Malta, scénariste et réalisatrice qui s’initie à l’animation et a insufflé selon Les Cahiers du cinéma la touche de folie qui irrigue Linda veut du poulet !. Ce renfort est bienvenu et permet d'échapper aux tares de La Jeune Fille sans mains en conservant les qualités visuelles. Loin du conte gentillet et mou, Linda veut du poulet ! est dynamique et révolté, avec des protagonistes faisant fi de la loi et de l’ordre, un monde où les enfants sont rois et où les adultes les suivent dans leurs bêtises. Le doublage français est correct, c’est suffisamment rare pour le signaler, il n'y a que les chansons qui m'ont agacé, trop puériles et mal interprétées. Cela m’a donné envie de voir Simple Women (2019), le premier film de fiction de Chiara Malta.


Films vus seuls
水戸黄門漫遊記 [Mito Kômon manyûki] de Kenji Misumi (1958, Les carnets de route de Mito Kômon)
A 61 ans, le respecté daimyo Mitsukuni Tokugawa, aussi nommé Mito Kômon, part à la retraite. Peu désireux de rester dans sa demeure à recevoir les dignitaires de passage, il décide de prendre la route, accompagné de deux samouraïs prestigieux, Sukesaburo Sasaki et Kakunoshin Atsumi. Comprenant que son chemin a été truffé de mises en scènes visant à lui construire une aura de justicier, il fausse compagnie à ses gardes et tombe sur deux sympathiques voleurs pour les remplacer.

Mito Kômon est un héros récurrent du cinéma japonais. Entre 1952 et 1961, il apparaît dans dix-huit titres de la Toei, incarné par Ryûnosuke Tsukigata (excepté pour les deux de 1952). Envieux du succès rencontré, les autres studios se lancèrent dans la course avec leurs propres versions : deux Shintôhô et deux Shôchiku en 1958-1959, un Tôhô en 1959 et un Daiei en 1958. C’est ce dernier qui nous occupe ici, dirigé par un Kenji Misumi qui ne se démarquait pas encore du tout-venant. Mito Kômon est joué par Ganjirô Nakamura, un fidèle de la Daiei fameux en Occident pour son rôle dans Herbes flottantes d’Ozu (1959), et un des braves brigands par un jeune Shintarô Katsu.
Mito Kômon manyûki est une grosse comédie qu’il convient de replacer dans le contexte de concurrence mentionné auparavant. Dans cette mouture, Mito Kômon est un vieux naïf légèrement sénile, un pion dans les mains des courtisans. La Daiei se moque d’un des personnages phare de la Toei, en le descendant de son piédestal et en soulignant ses faiblesses. C’est laborieusement monté, les acteurs sont en roue libre et l’humour est parfois pénible. A réserver aux complétistes de Misumi ou de Mito Kômon (que je plains s’il doive se taper l’intégralité de la série TV de la Toei démarrée en 1969 et terminée en 2011, soit 1227 épisodes…).


The Slayer de J.S. Cardone (1982)
Kay est une peintre réputée hantée par un affreux cauchemar depuis son enfance. L’ouverture d’une importante exposition s’approche et, pour la déstresser, son mari a organisé un week-end sur une île déserte avec son beau-frère et son épouse. Ils débarquent sous un ciel gris et Kay est immédiatement mal à l’aise. Elle a une impression de déjà-vu, avec un cinéma abandonné semblable à un bâtiment aperçu en songe. Idem pour la maison de vacances, identique à celle d’un tableau récemment achevé.

J.S. Cardone est un réalisateur, scénariste et producteur d’obscurs péloches d’horreur fauchées. The Slayer est son premier opus, catégorisé video nasty en Grande-Bretagne à l’époque et interdit jusqu’au début des années 90. C’est franchement exagéré, The Slayer est fondé sur une ambiance et propose de rares explosions de violence. Il y a de bonnes idées avec un mélange rêve/réalité qui précède de deux ans A Nightmare on Elm Street (1984) et une héroïne torturée. Ça manque néanmoins furieusement de rythme et je me suis ennuyé.


黒の凶器 [Kuro no kyôki] d’Akira Inoue (1964, Black Weapon)
Katanayagi est employé à Dainippon Electrics, une entreprise d’électronique. Il bosse dur et espère être promu ingénieur. Un soir dans un bar, il croise la belle Reiko dont il tombe amoureux. Elle dit être intéressée par l’évolution des actions de Dainippon Electrics et demande à Katanayagi d’enquêter sur leur prochaine invention. C’est en fait une espionne pour Taiyo Electric et Katanayagi est viré quand le chef de la sécurité apprend qu’il a fourni des renseignements précieux. Trois ans plus tard, Katanayagi est devenu un espion industriel, il souhaite se venger de Taiyo Electric et de Reiko.

Kuro no kyôki est le neuvième volet de la série noire de la Daiei, le cinquième avec Jirô Tamiya dans le rôle principal et le deuxième tiré d’un roman de Toshiyuki Kajiyama après La voiture d'essai noire (1962). L’optique est similaire, la rivalité entre deux compagnies sur fond d’intrigues et de manœuvres douteuses pour subtiliser les plans de l’adversaire. Sauf qu’au lieu d’être centré sur ceux qui protègent l’information, on se penche cette fois sur le destin de l’espion. Stylistiquement, on revient à du noir et blanc sobre, laissant de côté les excès de Kuro no chôsensha (1964). La Daiei a confié le projet à un produit de la maison, Akira Inoue, qui dirigera le dixième Zatoichi en 1965 et le septième Nemuri Kyôshirô en 1966. Kuro no kyôki n’a pas l’intensité de La voiture d'essai noire et je n’ai pas été convaincu.


The Darkening Trail de William S. Hart (1915)
Jack Sturgess est un playboy irresponsable répudié par son père pour son refus de se marier avec une femme qu’il avait mis enceinte. Il arrive dans une bourgade d’Alaska et séduit la tenancière du saloon Ruby McGraw, au grand désarroi du brave Yukon Ed qui avait des vues sur elle. Il vit rapidement aux crochets de Ruby et est forcé par Ed de l’épouser. Reprenant ses mauvaises habitudes, Jack se met à boire et à fréquenter les filles.

Je savais l’impact de Douglas Fairbanks sur le cinéma japonais des années 20 mais j’ignorais celui de William S. Hart avant de lire The Japanese Film: Art and Industry. Ses héros de western solitaires et vengeurs semblent avoir inspirés le jidai-geki naissant à l’aube des années 20. Je n’avais vu aucun film avec William S. Hart, acteur/réalisateur/producteur phare des années 10 et je commence par un de ses premiers longs métrages. Il n’apparaît en Yukon Ed qu’au bout d’une vingtaine de minutes (sur une cinquantaine) dans un drame sentimental scénarisé par C. Gardner Sullivan, avec qui il travaillera régulièrement. Si William S. Hart est crédible en soupirant éconduit plein de principes, le récit est trop conventionnel et la copie que j’ai récupérée était affreuse, ce qui n’a pas aidé. Il y a pourtant de l’idée et il va me falloir davantage d’exemples pour me forger une opinion.


A Vizinha do Lado de António Lopes Ribeiro (1945)
Tandis qu’il est censé étudier la médecine à Lisbonne grâce à l’argent de son père, Eduardo vit en couple avec Isabel, une actrice avec qui il a monté une revue théâtrale. La relation est orageuse, Eduardo et Isabel passant leur temps à se disputer. Quand débarque de province son oncle Plácido, professeur de morale et parangon de vertu, Eduardo pense qu’il va devoir rentrer dans son village. Plácido s’avère moins sérieux qu’escompté et, avec le soutien du portier Jerónimo et de leur voisin M. Saraiva, ils vont retourner la situation.

A Vizinha do Lado est tiré d’une pièce d’André Brun, dramaturge portugais d’origine française très populaire durant les années 10 spécialisé dans les revues et le vaudeville. S'y ajoute l’influence de la comédie à la portugaise dont on retrouve des collaborateurs récurrents, notamment Ribeirinho et António Silva. La nature théâtrale se ressent fortement, c’est statique et téléphoné, sans le dynamisme et la cocasserie des meilleurs représentants du genre. Cela n’empêcha pas A Vizinha do Lado de gagner le grand prix du Secretariado Nacional de Informação alors que son directeur détestait les comédies. Il faut dire que la production portugaise n’était pas pléthorique et qu’António Lopes Ribeiro était le metteur en scène officiel du régime (même si A Vizinha do Lado ne comporte pas d’aspects propagandistes évidents).


二匹の用心棒 [Nihiki no yôjimbô] de Kenji Misumi (1968, Les deux gardes du corps)
Sous des dehors rudes, Yatappe est un yakuza au cœur pur qui n’hésite pas à secourir la veuve et l’orphelin. Il se heurte régulièrement à Morisuke, un collègue retors et bagarreur. Un jour, il croise un veuf qui conduit sa fille de six ans Sayo chez sa belle-famille. Sans le sou, celui-ci craint d’être rejeté, prie Yatappe d’accomplir la tâche à sa place et se jette dans un fleuve en contrebas. Contraint et forcé, Yatappe convainc la grand-mère de Sayo de la recueillir, lui offre tout son argent et s’en va sans rien demander. Dix ans s’écoulent, Sayo est devenu une belle adolescente et attend en vain la réapparition de son sauveur.

Shin Hasegawa était un prolifique romancier adepte du matatabi-mono, récits centrés sur les aventures de yakuzas itinérant. Seki no Yatappe est une de ses pièces les plus célèbres, publiée en 1929 et adaptée à de multiples reprises sur grand et petit écran. Nihiki no yôjimbô est au minimum la sixième version au cinéma et succède à celle de la Toei de 1963 dans laquelle Yatappe était incarné par Kinnosuke Nakamura. Dans celle de la Daiei de 1968 critiquée ici, le rôle devait revenir à Raizô Ichikawa, qui dut abandonner le tournage en raison d’un cancer et décéda l’année suivante. Le studio se rabattit sur Kojiro Hongo pour le remplacer, acteur de moindre envergure souvent employé dans les films d’horreur ou les tokusatsu et qui évoque un peu Kinnosuke Nakamura.
Nihiki no yôjimbô aurait clairement eu une autre ampleur avec Raizô Ichikawa. En l’état, cela reste un bon matatabi-mono, avec une vision idyllique du héros yakuza habituelle à cette période. La rivalité entre Yatappe et Morisuke est amusante et les péripéties s’enchaînent sans interruption. L’absence de star et la réécriture du script en conséquence permet de ne pas se focaliser excessivement sur un seul protagoniste, il a y de légères touches dramatiques bien amenées et les prémices d’une certaine violence graphique qui annoncent le Misumi des années 70. Un agréable divertissement malheureusement introuvable (vu pour ma part à la rétrospective Misumi de la Cinémathèque française).


The Phantom Speaks de John English (1945)
Le docteur Paul Renwick est persuadé que les fantômes existent et que les gens dotés d’une volonté suffisamment forte peuvent revenir d’entre les morts. Juste avant son exécution, il s’arrange pour discuter avec Harvey Bogardus, un truand sans pitié, pour le préparer psychologiquement à un retour et prouver sa théorie. Quelques jours plus tard, dans le bureau de Paul, l’esprit d’Harvey se matérialise. L’expérience prend toutefois une tournure imprévue, ce dernier s’avérant capable de contrôler le médecin et souhaitant assouvir sa vengeance.

Je regarde parfois des trucs sans trop me souvenir pourquoi ni comment j’en avais entendu parler. C’est le cas de ce The Phantom Speaks, une série B mollassonne de Republic Pictures. Republic Pictures était un des représentants les plus connus de la Poverty Row, des studios fauchés spécialisés dans les petits budgets. Le casting de The Phantom Speaks est étonnamment solide : le personnage principal, un journaliste qui enquête sur l’affaire, est interprété par Richard Arlen, vedette de Wings (1927) et Island of Lost Souls (1932) tombé dans l’oubli durant les années 30 ; Paul Renwick par Stanley Ridges, vu dans Sergeant York (1941) et To Be or Not to Be de Lubitsch (1942) ; et Harvey Bogardus par Tom Powers, le mari assassiné dans Double Indemnity (1944). Pas grand-chose sinon, ça manque de rythme, avec une intrigue parascientifique bidon typique de l’époque, une photographie banale et des décors minimalistes.


Livres
Le clan du brouillard - Chroniques de la lune rouge 3 de Jean-Pierre Fontana & Alain Paris (Fleuve noir, collection « Anticipation », 1985), 186 p.
Sarkô reprend ses esprits dans la jungle. Il est rejoint par Joskren qui, avant de lui dire adieu, lui annonce que son épouse et son fils sont encore vivants et se sont enfuis au Sud, au-delà du fleuve Mazon. Ses eaux sont tumultueuses et Sarkô réussit à le franchir avec difficulté. Terrassé par la fatigue, il se repose en compagnie d’un amusant oiseau qui tourne autour de lui. Quand une bande de chasseurs crible le volatile de flèches, Sarkô s’énerve, tue un des indigènes et est assommé dans la bataille. Convoité par une jeune femme du groupe, il sauve sa peau et gagne le respect du chef. Mais la terrible créature qui sommeille en lui menace de s’éveiller à tout moment et de briser cette fragile entente.

Ce troisième volume des Chroniques de la lune rouge m’a moins convaincu que les précédents, davantage porté sur le graveleux, avec un Sarkô solitaire assez passif et victime des évènements. Si le premier tome évoquait Conan et le second avait des côtés lovecraftiens, on est ici dans un mélange entre un film de jungle et de prison, comme si Sarkô avait été capturé par le clan de Jack de Sa majesté des mouches. Malgré ces défauts, Le clan du brouillard se termine par un gros cliffhanger et j’attends la suite.

Contes d'une grand-mère chinoise d’Yveline Féray (Philippe Picquier, collection « Contes et légendes d’Asie », 2016), 167 p.
Contes d'une grand-mère chinoise rassemble six contes arrangés par Yveline Féray :
Cinq rats jouent de mauvais tours à la Capitale Orientale : Cinq rats du Paradis de l’Ouest descendent sur Terre pour assouvir leurs ambitions.
Le fou des fleurs : Le monde d’un vieillard qui idolâtre ses fleurs s’écroule lorsqu’un vil seigneur local vient piétiner son jardin.
Le Chat-Flamme : Un matou se débrouille pour croquer des rats sans se fatiguer.
La tour du pic du Tonnerre ou le Serpent Blanc : L’herboriste Xu Xuan tombe amoureux d’une riche orpheline, qui lui offre un lingot pour organiser leur mariage. L’argent s’avère volé et Xu Xuan est arrêté.
La nuit du mariage des rats : Une frêle fille surgit dans la cuisine de la cabane isolée d’un rustre charbonnier et propose son aide.
La charmante : Le pauvre lettré Ho de Suzhou est épris d’une magnifique prostituée qu’il n’a pas les moyens de racheter.
Contes d'une grand-mère chinoise est le deuxième livre de la collection « Contes et légendes d’Asie », qui réunit des contes traditionnels de pays d’Asie du Sud et de l’Est. Si je connaissais mal la culture cambodgienne qui était au cœur du recueil antérieurement chroniqué sur ce blog, ce n’est pas le cas de la chinoise qui m’est plus familière. Je n’ai donc pas été dépaysé et j’ai été ravi de découvrir une version de la légende du serpent blanc, un classique aux nombreuses adaptations cinématographiques. Les animaux sont d’ailleurs amplement représentés, ce qui me fait toujours plaisir. C’était une rapide et agréable lecture, avec des récits variés agrémentés d’une poignée de notes explicatives bienvenues.


Film/Genre de Rick Altman (British Film Institute, 2006), 246 p.
Dans cet ouvrage de référence, l’universitaire américain Rick Altman décortique la notion de genre dans le cinéma hollywoodien. Il énonce tout d’abord la façon dont le concept est perçu et manié comme une entité stable, transhistorique, clairement définie par l’industrie, adoptée par les critiques et reçue passivement par les spectateurs. Dans ce cadre, chaque long métrage est irrémédiablement accolé à un seul genre, sans ambiguïté possible. Il s’applique ensuite à démolir ces suppositions une par une. Selon lui, le genre est une construction évolutive bâtie à un instant t par les interactions entre un ensemble d’acteurs : les producteurs, les critiques, les revues, les publicités, les fans, le public... La plupart des genres sont hybrides et proviennent de combinaisons, ce sont des adjectifs qualificatifs qui sont hissés au rang de nom quand ils accèdent à la reconnaissance (exemple : le musical qui était au départ musical drama, musical comedy, musical romance…). Les films eux-mêmes peuvent être rattachés à plusieurs genres et ces affiliations se modifient au cours du temps.

Pendant ses deux premiers tiers, Film/Genre est passionnant, il m’a forcé à réfléchir à ma manière de catégoriser les films et les raisons qui me poussent à les ranger dans certaines cases plutôt que dans d’autres. Bien que totalement américano-centré, j’y ai immédiatement vu les applications sur le cinéma japonais, un grand cinéma de genres très similaire dans son organisation durant son âge d’or à son équivalent hollywoodien. L’utilisation des principes de Rick Altman y donneraient des résultats féconds. Le dernier tiers en revanche m’a laissé dubitatif. Le chercheur se penche sur les spectateurs, il élabore des hypothèses confuses sur la prépondérance de leur intersubjectivité et de leurs réseaux, multipliant pour appuyer sa thèse des métaphores fumeuses entre genres et langage, genres et ornithologie, genres et nations, genres et urbanisme… Je n’en ai pas retiré grand-chose et j’aurais pu m’arrêter à la conclusion du chapitre 8 (sur 12). En dépit de ce problème et d’une complexité inhérente à ce style d’étude théorique, cela reste un incontournable. Signalons enfin un élément positif rare dans un bouquin de ce type : dans chaque chapitre, Rick Altman résume ses idées clés en quelques points récapitulatifs, facilitant la compréhension et une éventuelle consultation ultérieure.


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