samedi 15 octobre 2022

Les Luso-Américains dans le cinéma hollywoodien (ancien Tumblr)

Quel est le point commun entre Edward G. Robinson, Spencer Tracy, John Garfield, Anthony Quinn, Julia Roberts et Milla Jovovich ?
C’est pourtant évident au vu de l’image précédente, tous et toutes ont interprété un personnage principal luso-américain dans un film américain.
La communauté portugaise aux Etats-Unis n’a jamais franchement intéressé les cinéastes mais Geoffrey L. Gomes, dans un article des années 90, a tout de même réussi à trouver une grosse vingtaine de titres comportant des Luso-Américains dans des rôles principaux ou secondaires (1).

Deux éléments ressortent :
  • Une surreprésentation de pêcheurs. Nombre de Luso-Américains travaillèrent pourtant dans les usines et dans les champs, et pas uniquement à des postes subalternes. Dans les années 30, les Luso-Américains contrôlaient 60 à 70% de l’industrie du lait en Californie (2). Ils importèrent également avec succès la patate douce aux Etats-Unis. Nous profitons au passage de cet espace pour déplorer la trop faible utilisation de la patate douce en France, qui réjouit pourtant le cœur des petits et des grands.
  • Une absence d’acteur/actrice luso-américain(e). Aucun acteur/actrice luso-américain(e) n’a interprété de Luso-Américain(e) avant les années 1980. Le premier cas recensé par Geoffrey L. Gomes d’acteurs luso-américain jouant des Luso-Américains dans des rôles secondaires est Signs of Life (1989), et le seul cas dans un gros (et très mauvais) film hollywoodien est Phenomenon (1996). Aujourd’hui encore, le cinéma américain ne comporte, à notre connaissance, aucun cas de personnage principal luso-américain interprété par un Luso-Américain.

Ci-dessous les titres principaux comportant au moins un personnage luso-américain dans un rôle important :
Outside the Law de Tod Browning (1921)
(Lon Chaney (Sr.) en méchant trafiquant portugais)

Tiger Shark d’Howard Hawks (1932)
(Edward G. Robinson avec des cheveux bouclés, une belle moustache, et un accent douteux qui avait impressionné des critiques clairement peu coutumiers de l’accent portugais)

Captains Courageous de Victor Fleming (1937), tiré d’un roman très connu de Rudyard Kipling. Spencer Tracy gagna l’oscar du meilleur acteur pour son rôle de Manuel, pêcheur portugais au grand cœur. Le roman fut réadapté à la télévision en 1977 avec le Mexicain Ricardo Montalban dans le rôle du pêcheur portugais.
(Spencer Tracy et son affreuse moumoute bouclée, baragouinant un portugais incompréhensible dans un accent improbable inspiré du fameux accent portugais d’Edward G. Robinson dans Tiger Shark)

Daughters Courageous de Michael Curtiz (1939)
(John Garfield en pêcheur d’origine portugaise. A l’inverse de ses prédécesseurs et successeurs, une appréciable absence de cheveux artificiellement bouclés, de moustache ou d’accent chelou)

The World in His Arms de Raoul Walsh (1952). Anthony Quinn parle à plusieurs moments un portugais à peu près compréhensible avec l’accent passe-partout propre à l’acteur, le même quelle que soit l’origine de son personnage.
(Anthony Quinn en chasseur de phoques portugais : look de pirate, cheveux vaguement bouclés, moustache et boucle d’oreille)

Stars and Stripes Forever d’Henry Koster (1952). Le seul film américain consacré à la vie d’un luso-américain ayant existé, le compositeur John Philip Sousa. L’origine portugaise du compositeur, né aux Etats-Unis de père portugais et de mère bavaroise, n’est toutefois jamais mentionnée.
(Clifton Webb dans le rôle de John Philip Sousa)

Mystic Pizza de Donald Petrie (1988)
(Annabeth Gish, Lili Taylor et Julia Roberts, serveuses portugaises dans une « pizzeria portugaise » servant la fameuse pizza aux « épices de l’Algarve », spécialité régionale dont seuls les scénaristes du film ont entendu parler)

A la liste de Geoffrey L. Gomes, nous ajouterons The Claim de Michael Winterbottom (2000). Milla Jovovich chante un fado dans un portugais compréhensible malgré un fort accent. Problème : elle chante un fado de Coimbra, genre de fado réservé aux hommes. Son père dans le film étant de Lisbonne, il n’y a aucune justification à cette entorse à la tradition.
(Milla Jovovich, une tenancière portugaise de saloon chantant un fado écrit à la fin des années 1910 au Portugal alors que le film se situe dans les années 1860 aux Etats-Unis)


(1) Geoffrey L. Gomes, « Cinematic Portrayals of Portuguese-Americans », Gávea-Brown, vol. XVII-XVIII (Jan. 1996-Dec. 1997), pp. 25-48.
http://brown.edu/academics/portuguese-brazilian-studies/sites/brown.edu.academics.portuguese-brazilian-studies/files/uploads/gavea%2017-18.pdf

(2) http://www.rpnca.org/?page_id=1498

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